Actus d’Atlantes

Le protocole d’accord préélectoral pour le renouvellement des CSE : savoir faire les bons choix

Dans notre numéro paru en mai 2022, nous avons exposé les éléments permettant d’appréhender globalement les négociations préélectorales.

Il convient à présent de s’intéresser au protocole d’accord préélectoral (PAP) dont la négociation permet à l’employeur et aux organisations syndicales de déterminer le cadre matériel des élections.

Plus qu’une étape obligatoire dans l’organisation des élections, le PAP est un enjeu politique pouvant avoir des incidences sur la configuration et le fonctionnement du dialogue dans l’entreprise.

Contrairement aux accords d’entreprise classiques, le PAP est négocié entre l’employeur et les syndicats intéressés et non obligatoirement représentatifs, bien que ces derniers y prennent également part.

Il en résulte que les OS disposent d’une grande liberté dans le choix des personnes pouvant être mandatées.

C’est pourquoi la question de la constitution de son équipe de négociation dans la perspective d’une échéance élection révèle une importante pratique (1).

Par ailleurs, et dès lors que le temps de la négociation est assez contraint et le cadre circonscrit par rapport à l’objet des échanges, opérer des choix devient tout aussi important pour la gestion de son agenda (2), et des thèmes sur lesquels se focaliser dans ses propositions (3).

Toutefois, il est utile de prêter une attention particulière à des sujets techniques relatifs aux conditions de majorité sur lesquels reposent la validité de l’accord qui sera trouvé avec la direction de l’entreprise (4). 

  1. Constituer son équipe de négociation 

Le code du travail ne limite pas les organisations syndicales dans le choix des personnes qu’elles mandatent pour la négociation du PAP.

En application de l’article L. 2314-5, al. 1 du code du travail, la négociation du PAP débute par l’invitation, par tout moyen, des organisations syndicales intéressées, c’est-à-dire, celles qui satisfont aux critères de respect des valeurs républicaines et d’indépendance, légalement constituées depuis au moins deux ans et dont le champ professionnel et géographique couvre l’entreprise.

En revanche, les organisations syndicales :

  • Reconnues représentatives dans l’entreprise,
  • Y ayant constitué une section syndicale,
  • Ou affiliées à une organisation syndicale reconnue représentative aux niveau national et interprofessionnel,

doivent être invitées par courrier par l’intermédiaire du délégué syndical désigné[1], ou à défaut, des structures syndicales au niveau des branches ou des unions de syndicats auxquelles elles ont adhéré[2].

Dans les entreprises multi-établissements, cette invitation est envoyée au syndicat représentatif au niveau de l’entreprise et/ ou au délégué syndical central.

A priori, le syndicat peut mandater aussi bien un salarié de l’entreprise qu’une personne extérieure.

Mais attention ! Un mandat tacite est insuffisant[3], il est prudent d’adresser formellement l’identité des personnes mandatées pour négocier le PAP.

Faut-il pour autant toujours désigner les salariés de l’entreprise susceptibles de se porter sur les listes électorales comme négociateurs du PAP ?

La réponse n’est pas aussi évidente !

CONSEIL ATLANTES,

 

Le partage des rôles étant important pour les élections et le fonctionnement du dialogue social, un syndicat a intérêt de prévoir une équipe de négociation constituée autour :

 

  • D’une personne déjà imprégnée des sujets sur le mandat qui s’achève,
  • Et des nouveaux entrants dans la perspective d’organiser la configuration de sa liste électorale et de la nouvelle équipe à l’issue des élections.

 

Les règles de la négociation collective sont applicables au PAP, et sauf accord de l’employeur, chaque délégation ne peut dépasser le nombre de 3 ou 4 membres en fonction de l’effectif de l’entreprise.

 

 

  1. Gérer son temps et préparer l’ouverture des négociations

Dans le cadre de la négociation du PAP, l’employeur est tenu d’une obligation d’information à l’égard des organisations syndicales intéressées.

L’article L. 2314-5 du code du travail, précise que l’invitation des OS par l’employeur doit leur parvenir au plus tard quinze jours avant la date de la première réunion de négociation, les laissant très peu de temps pour constituer leur équipe de négociation.

L’employeur entame le processus électoral deux mois avant la date d’expiration des mandats, et le premier tour a lieu dans la quinzaine précédent cette date.

La négociation se déroule pendant cette période au cours de laquelle l’employeur est tenu de fournir aux syndicats participants à la négociation les éléments nécessaires au contrôle de l’effectif équivalent temps plein et de la régularité de la liste électorale.

Au regard des délais contraints pour la tenue des élections, il peut être difficile de mener sereinement les négociations sans l’élaboration d’un calendrier prévisionnel en retenant les dates importantes ci-après :

- L’expiration du mandat des élus en cours,

- Signature du protocole d’accord,

- Organisation des élections, le 1er tour des élections

- Première réunion du CSE

  1. Savoir ce qui est négociable et les choix à opérer

La négociation du PAP porte sur plusieurs thèmes dont certains doivent être obligatoirement abordés (la répartition des sièges à pourvoir entre les collèges, et la fixation des modalités pratiques du vote), et d’autres relèvent de la faculté des parties.

L’attention des négociateurs doit être portée sur la clause relative à la proportion de femmes et d’hommes composant chaque collège électoral en vue d’observer l’égalité femme/homme[4].

Les Parties ont toutefois la faculté de jouer sur des leviers de fonctionnement en insérant dans le PAP :

  •  Les clauses relatives au nombre de sièges ou au volume des heures individuelles de délégation, dès lors que le volume global, au sein de chaque collège, est au moins égal à celui résultant des dispositions légales au regard de l’effectif de l’entreprise[5] ;

 

  • Toutes clauses supra-légales et supra-conventionnelles[6], telles les conditions d’ancienneté, et la possibilité de déroger à la limitation de mandats successifs dans les entreprises de 50 à 300 salariés. Cette clause sera importante dans l’hypothèse où elle n’aura pas été négocié et mis dans le précédent PAP.

Le cas des heures de délégations, qu’il est possible d’augmenter mécaniquement pour chaque membre du CSE, en réduisant le nombre d’élus au CSE, parait une hypothèse pragmatique de la portée des clauses facultatives.

CONSEIL ATLANTES,

 

Il est important de déterminer ses choix sur le plan organisationnel après un état des lieux des quatre dernières années, pour fixer les priorités de équipes sur les thèmes de négociation.

 

Ainsi, dans l’exercice de leur droit à l’information, les négociateurs (avec l’appui du délégué syndical), peuvent effectuer un travail préparatoire et de remise en perspective des accords d’entreprises relatifs à l’exercice du droit syndical ainsi que des textes applicables au CSE.

 

 

  1. Contenu et conclusion du protocole : Quelques règles techniques à maitriser

La conclusion d’un PAP est soumise à une double majorité de signature[7] :

  • Celle des syndicats ayant participé à sa négociation (les syndicats intéressés) ;
  • Et parmi les signataires, les syndicats représentatifs ayant recueilli la majorité des suffrages exprimés lors des dernières élections professionnelles.

Que signifie la majorité ?

La circulaire DGT 2011-6 du 27 juillet 2011, précise que pour obtenir la majorité, il faut recueillir au moins plus de la moitié.

Quel syndicat (s) compte dans le calcul de la majorité ?

Le simple fait de participer à la première réunion suffit pour être qualifié de syndicat intéressé, et par conséquence, d’être comptabilisé pour le calcul de la majorité des signataires[8].

En l’absence de syndicat représentatifs dans l’entreprise, seule la condition relative à la signature par la majorité des syndicats intéressés ayant participé à la négociation s’applique.

Attention !

Il convient de retraiter les pourcentages en présence des syndicats catégoriels comme la CFE-CGC, syndicat catégoriel pour lequel le calcul est effectué à partir des suffrages exprimés en sa faveur à l’ensemble des suffrages exprimés au niveau de l’ensemble de l’entreprise[9].



[1] Cass. Soc. 13 février 2003, n°01-60813, BC V n°56 ; Cass. Soc. 5 avril 2011, n°10-18813 D

[2] Cass. ass. Plén. 5 juillet 2002, n°00-60275, B. ass. Plén. n° 2

[3] Cass soc 17 avril 1991, n°89-61556

[4] Art. L 2314-13 du code du travail

[5] Art. L2314-7 du code du travail

[6] Favorables aux salariés par rapport à ce que prévoit la loi ou la convention collective

[7] Article L 2314-6 du code du travail

[8] Cass. Soc. 26 septembre 2021, n°11-60231

[9] Cass. Soc. 16 janv. 2008, n°07-60163

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