Lorsque le mercure grimpe, les interrogations sur les adaptations des conditions de travail habituelles se multiplient : la loi prévoit-elle une température maximale pour les locaux de travail ? Le travailleur peut-il adapter sa tenue vestimentaire ? L’employeur doit-il proposer davantage de pauses ?
Notre sélection des questions les plus fréquentes.
1. A quelles obligations générales l’employeur est-il tenu ?
Comme le rappelle le ministère du travail sur son guide de prévention des risques liés aux vagues de chaleur 2023, l’employeur doit :
2. Le Code du travail envisage-t-il une température maximale à ne pas dépasser dans les locaux ?
Aussi étonnant que cela puisse paraître, le Code du travail ne prévoit pas de dispositions concernant la température maximale ou minimale sur poste de travail.
La norme NF X35-203/ISO 7730 relative au confort thermique, non actualisée depuis 2006, précise les seuils suivants :
Il est à noter que l’INRS (Institut national de recherche et de sécurité) considère qu’au-delà de 30 °C pour un salarié sédentaire et 28°C pour un travail nécessitant une activité physique, la chaleur peut constituer un risque pour la santé des salariés.
Rappelons que l’employeur est investi d’une obligation générale de santé et de sécurité à l’attention du personnel. Cette obligation lui impose de prendre toutes « les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs » (C. trav., art. L. 4121-1).
L’employeur a donc intérêt, si la température surpasse les limites précitées par l’INRS, à agir sans délai pour assurer la sécurité des salariés, en y intégrant les conditions de températures.
Conseil : Que peut faire le CSE si les températures deviennent insupportables pour les salariés ?
N’hésitez pas à alerter immédiatement l’employeur si les températures dépassent les 30 ou 28 C° précités, afin qu’il puisse prendre toutes les mesures nécessaires pour préserver la santé des salariés :
3. Est-il possible d’adapter sa tenue en fonction des fortes chaleurs (exemple : bermuda, vêtements plus courts) ?
La réponse dépend de ce qui a été décidé au niveau de l’entreprise.
L’employeur peut apporter des limites à la liberté de se vêtir :
A titre d’exemple, les juges ont validé les licenciements de salariés qui portaient : bermudas, tongs, jogging, parcequ’ils étaient alors en contact avec la clientèle. En résumé, si l’employeur peut démontrer en quoi porter un short ou des tongs nuit à l’image de l’entreprise, ou ne répond pas aux impératifs de sécurité, il peut interdire à ses collaborateurs de les porter au travail.
Enfin, il est également possible de se fonder sur le guide de prévention des risques liés aux vagues de chaleur 2023 du ministère du travail qui indique aux travailleurs de : « Porter des vêtements légers qui permettent l’évaporation de la sueur (ex. : vêtements de coton), amples, et de couleur claire si le travail est à l’extérieur ».
Conseil : à défaut de prendre des initiatives unilatérales et de risquer une sanction disciplinaire, nous vous invitons à porter ces sujets sur un ordre du jour d’une réunion du CSE, afin de pouvoir négocier des mesures exceptionnelles en matière de tenue vestimentaire pendant ces périodes de fortes chaleurs. Il est également judicieux de vérifier ce qui a été prévu au sein du règlement intérieur de l’entreprise.
4. Qu’en est-il de la fourniture d’eau dans l’entreprise ?
De façon générale, en dehors des épisodes de fortes chaleurs, l’employeur doit mettre à la disposition des travailleurs de l’eau potable et fraîche (C. trav. art. R 4225-2).
De plus, lorsque des conditions particulières de travail conduisent les travailleurs à se désaltérer fréquemment, l’employeur met gratuitement à leur disposition au moins une boisson non alcoolisée (C. trav. art. R4225-3).
Les boissons et les aromatisants mis à disposition sont choisis en tenant compte des souhaits exprimés par les travailleurs et après avis du médecin du travail.
Nous invitons le CSE à vérifier l’emplacement des postes de distribution des boissons, notamment leur proximité avec les postes de travail.
5. Le droit de retrait peut-il être mis en œuvre dans une situation de grosses chaleurs ?
C’est une question qui nous est souvent posée, notamment par des représentants du personnel sollicités par les salariés.
En ce qui concerne les principes régissant le droit de retrait, l’article L. 4131-1 du Code du travail dispose que :
« Le travailleur alerte immédiatement l’employeur de toute situation de travail dont il a un motif raisonnable de penser qu’elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé ainsi que de toute défectuosité qu’il constate dans les systèmes de protection.
Il peut se retirer d’une telle situation.
L’employeur ne peut demander au travailleur qui a fait usage de son droit de retrait de reprendre son activité dans une situation de travail où persiste un danger grave et imminent résultant notamment d’une défectuosité du système de protection. »
L’article L. 4131-3 du Code du travail ajoute qu’« aucune sanction, aucune retenue de salaire ne peut être prise à l’encontre d’un travailleur ou d’un groupe de travailleurs qui se sont retirés d’une situation de travail dont ils avaient un motif raisonnable de penser qu’elle présentait un danger grave et imminent pour la vie ou pour la santé de chacun d’eux. »
Sous réserve de l’appréciation des tribunaux, le droit de retrait pourrait être invoqué par les salariés exposés à de très fortes chaleurs. À cet égard, le Haut conseil de la santé publique a recommandé aux salariés de cesser immédiatement toute activité dès qu’apparaissent des signes de malaise et de prévenir les collègues, l’encadrement et le médecin du travail.
Du côté des tribunaux, plusieurs arrêts ont été dans le sens du salarié :
Nous vous invitons, avant de songer à l’exercice du droit de retrait, d’inciter l’employeur à prendre toutes les dispositions nécessaires pour la sécurité des salariés.
6. Les alertes « vigilances rouges » de Météo France étant plus fréquentes ces derniers étés, existe-il des obligations supplémentaires ?
Absolument. Dans une instruction interministérielle relative à la gestion des vagues de chaleurs en date du 12 juin 2023, il est précisé que l’employeur doit :
Le CSE peut tout à fait s’appuyer sur le service de santé de prévention et de santé au travail, et de la DREETS si besoin.
Vous pouvez retrouver les instructions et guides précités sur ces liens :
Anissa CHAGHAL
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