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La plume de l'alouette
Plume septembre 2021

JURISPRUDENCE ATLANTES
Heures passées en réunion plénière de CSE

Dans cette affaire, une direction entendait décompter les heures de réunions plénières de CSE sur les temps alloués aux réunions des commissions du CSE puis une fois ces temps épuisés sur les heures de délégation des membres du comité.

Pour soutenir son propos, elle se basait sur la rédaction alambiquée des articles L2315-11 et R2315-7 du Code du travail relatifs aux temps de délégation dont elle tirait une interprétation toute personnelle.

Pour rappel, ces derniers prévoient que :

Article L2315-11 :

Est également payé comme temps de travail effectif le temps passé par les membres de la délégation du personnel du comité social et économique.

2e  : Aux réunions du comité et de ses commissions, dans ce cas dans la limite d’une durée globale fixée par accord d’entreprise ou à défaut par décret en Conseil d’État.

Article R2315-7 :

À défaut d’accord d’entreprise, le temps passé par les membres de la délégation du personnel du comité social et économique aux réunions mentionnées au 2e de l’article L. 2315-11 n’est pas déduit des heures de délégation prévues à l’article
R. 2314-1 dès lors que la durée annuelle globale de ces réunions n’excède pas 30 heures pour les entreprises de 300 à 1000 salariés, 60 heures pour les entreprises d’au moins 1000 salariés. Cette rédaction interpelle et notamment sur ce qu’il fallait comprendre par « dans ce cas ».

 

Concrètement les plafonds d’heures mentionnés s’appliquent-ils à toutes les réunions du CSE et de ses commissions comme le soutenait la direction ou aux seules réunions des commissions comme le soutenait le CSE ?

C’est à cette question qu’à dû répondre le Tribunal judiciaire de Lyon saisi en référé par le CSE.

Au soutien de son propos, le CSE se basait sur de nombreux éléments :

Sur le fait que par principe et depuis de longue date, le temps passé en réunion plénière par les représentants du personnel (CE, DP, CHSCT) avec la direction de l’entreprise est payé comme du temps de travail effectif sans être déduit des heures de délégation des élus et que le législateur n’a pas entendu modifier cette règle dans les ordonnances de 2017.

Sur la position du Conseil constitutionnel qui, dans sa décision du 21 mars 2018 n°2018-761, précisait que les plafonds d’heures renvoyaient au « dernier cas » soit, aux seules commissions : « 54. En second lieu, en application de l’article L. 2315-11 du Code du travail, le temps passé, par les membres de la délégation du personnel du comité social et économique, « à la recherche de mesures préventives dans toute situation d’urgence et de gravité » et « aux enquêtes menées après un accident du travail grave ou des incidents répétés ayant révélé un risque grave ou une maladie professionnelle ou à caractère professionnel grave » est considéré comme du temps de travail effectif et n’a pas à être déduit du quota d’heures de délégation des membres titulaires. Il en va de même du temps passé aux réunions du comité social et économique et de ses commissions. Si, dans ce dernier cas, le 2e de l’article L. 2315-11 fixe une limite à ce principe, sous forme d’un plafond d’heures au-delà duquel le temps passé à ces réunions est déduit des heures de délégation, ces dispositions ne privent pas les représentants du personnel des moyens nécessaires à l’exercice de leur mission. »

Toute autre interprétation conduirait à empêcher le CSE de fonctionner et d’exercer ses prérogatives dans et en dehors des réunions.

Conclusion de cette affaire, aux termes d’une ordonnance de référé du 7 juin 2021 (n° 21/00504), le Tribunal donne raison au CSE par une décision simple et limpide, véritable leçon de français. Il considère que les textes sont clairs et que les termes « dans ce cas » ne peuvent se référer qu’aux réunions des commissions du CSE. Il rappelle également que « la législation prévoit donc que le temps passé en réunion plénière du CSE n’est pas concerné par la limitation horaire ». En conséquence, il rejette les arguments de la direction et considère que sa pratique de décompte des temps de réunions plénières cause un trouble manifestement illicite au fonctionnement du CSE.

Cette décision, la première à notre connaissance sur ce thème, confirme la position quasi unanime de la doctrine sur le sujet ainsi que celle de l’inspection du travail, du gouvernement et du Conseil constitutionnel.

Nous ne pouvons qu’espérer que les directions ne se risqueront plus à attaquer les CSE sur ce terrain.

 

 

Justin Saillard-Treppoz / Juriste - Responsable régional Aura

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Mise à jour :mercredi 17 avril 2024
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