Hôpitaux, aéroports, EDF, cheminots, avocats, pompiers, enseignants, étudiants, retraités… En cette veille de mobilisation contre la réforme des retraites, la contestation s’annonce massive. De quoi raviver, 24 ans plus tard, le souvenir des trois semaines de grèves de 1995 qui ont renversé le « plan Juppé » sur les retraites et la Sécurité sociale.
Un contexte tendu à la SNCF.
En 1995, un projet de contrat Etat-SNCF prévoyant la suppression de milliers de kilomètres de lignes met le feu aux poudres. L’attaque contre leur régime de retraite fut la goutte de trop.
En 2019, entre les désaccords sur les conditions de travail, le droit de retrait contesté par la direction et par l’Etat, la réforme ferroviaire qui reste en travers de la gorge des syndicats, l’atmosphère est tout aussi explosive.
Une lutte étudiante convergente.
En 1995, des grèves portant sur les conditions budgétaires s’organisent dans une vingtaine d’universités. La mobilisation des étudiants se joint ensuite au mouvement social contre le plan Juppé.
En 2019, la situation dans les facs est extrêmement préoccupante après l’immolation d’un étudiant devant le CROUS de Lyon. Les syndicats dénoncent une paupérisation estudiantine croissante. Opposés à cette réforme, ces derniers craignent qu’un allongement de la durée de cotisation retarde l’entrée des jeunes sur le marché du travail.
Cette fois-ci, tout le monde est concerné.
En 1995, seuls les fonctionnaires étaient visés par le plan Juppé. Dans le projet de réforme présenté cette année par Jean-Paul Delevoye, l’ensemble des salariés devront cotiser plus longtemps. En effet, l’introduction d’un âge pivot, en dessous duquel le montant des pensions fera l’objet d’un malus, aura pour conséquence un allongement de la durée de cotisation de tous les salariés.
L’absence de Gilets Jaunes en 1995.
Il y a 24 ans, la mobilisation contre la réforme était principalement syndicale. Aujourd’hui, les syndicats peuvent compter sur un mouvement neuf et populaire : celui des Gilets Jaunes. Leurs manifestations les samedis permettront de mobiliser les salariés du privé, souvent moins disposés à faire grève en semaine.
Emmanuel Macron avait annoncé cette réforme pendant sa campagne présidentielle.
En 1995, Jacques Chirac déclare vouloir réduire les déficits « pour qualifier la France pour la monnaie unique européenne ». Il improvise alors une réforme des retraites. Cette fois, l’exécutif ne prend pas les salariés par surprise et mise sur sa légitimité.
Cependant, le manque de base sociale du Président de la République pour instaurer un système par points est contesté. En effet, deux tiers des Français estiment que le mouvement du 5 décembre est justifié (+13% en un mois). Ils sont pourtant aussi nombreux à vouloir un alignement des régimes de retraite du public et du privé. Est-ce paradoxal ? Pas forcément. Nombreux sont ceux à rêver d’un alignement des régimes, mais par le haut !
Malek SMIDA
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