En septembre 2017, le gouvernement imposait par voie d’ordonnance de plafonner les indemnités qu’un salarié est susceptible de percevoir en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Plusieurs conseils de prud’hommes, dont l’une des missions est de contrôler la conformité des lois françaises au regard des conventions internationales, ont depuis jugé que ce plafonnement était contraire à l’article 24 de la Charte sociale européenne ainsi qu’à l’article 10 de la convention 158 de l’Organisation internationale du travail (OIT). Ces articles prévoient qu’une juridiction, en cas de licenciement infondé, doit pouvoir ordonner le versement au salarié d’une « indemnité adéquate » ou toute autre forme de réparation « appropriée ». Affolement au plus haut sommet de l’Etat. Le ministère du travail allant même jusqu’à remettre en cause la formation juridique des conseillers prud’homaux !
Le 26 février dernier, fait rare en droit du travail : le ministère de la justice a adressé une circulaire à tous les procureurs généraux des cours d’appel pour leur demander de recenser les décisions ayant retenu l’inconventionnalité du barème et de défendre ce plafonnement lorsque les cours d’appel seront saisies de cette question. La Chancellerie n’ayant pas oublié de mettre en copie « pour information » les président-e-s des cours d’appel et des tribunaux de grande instance.
Pour légitimer ce qui ressemble tout de même à une réelle pression sur le pouvoir judiciaire, la ministère de la justice a joint en annexe de sa circulaire des décisions du Conseil Constitutionnel et du Conseil d’Etat ayant validé ce plafonnement des indemnités.
Rappelons que, le 21 mars 2018, le Conseil Constitutionnel a contrôlé la constitutionnalité de ce barème et non sa conformité au regard des conventions internationales. Cette décision des juges constitutionnels est donc hors-sujet. L’arrêt du Conseil d’Etat du 7 décembre 2017, quant à lui, a été rendu en urgence, dans le cadre d’une procédure de référé-suspension en réponse à plusieurs demandes formulées par la CGT qui ne soulevait alors pas tous les arguments portés aujourd’hui à l’encontre du barème. De plus, le Conseil d’Etat a lui-même affirmé que « le rejet de ces demandes ne préjuge toutefois pas de l’appréciation [qu’il] portera sur la légalité des deux ordonnances, sur laquelle il se prononcera dans les prochains mois ». Par conséquent, aucune de ces deux décisions ne sauraient lier les juges judiciaires.
Cette circulaire ministérielle a pour but principal d’empêcher de possibles confirmations en appel de ces jugements des conseils de prud’hommes. Le dernier mot reviendra ensuite à la Cour de Cassation qui ne s’est pas encore prononcée sur la conventionnalité de ce barème. N’oublions pas qu’en 2008, le ministère de la justice avait recadré de la même manière les juges du fond dans le but de défendre le Contrat nouvel embauche (CNE). Cela n’avait pas empêché la Cour de Cassation, le 1er juillet de cette même année, de juger inconventionnel le CNE au regard de cette même Convention 158 de l’OIT !
Vous aussi, mettez la pression sur le pouvoir exécutif. Exigez du gouvernement la suppression du plafonnement des indemnités prud’homales en signant dès maintenant notre pétition : https://www.change.org/p/stop-au-bareme-des-indemnites-prud-homales
Malek SMIDA
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