Les travailleurs en ESAT ne relèvent pas du Code du travail mais bien du Code de l’action sociale et des familles, un statut qui ne leur permet pas de jouir des mêmes droits que les salariés de droit privé.
Un salarié qui conclut un contrat de travail, bénéficie des dispositions du Code du travail, il s’engage à occuper un poste de travail en contrepartie duquel, il perçoit une rémunération.
Un travailleur en ESAT conclut un contrat de soutien et d’aide par le travail, après décision favorable de la CDAPH[1], ce contrat précise à la fois les activités professionnelles mais aussi les modalités de mise en place d’un soutien médico-social ou éducatif.
Un décret publié en décembre 2022[2] renforce les droits de ces travailleurs pour se calquer davantage sur ceux des salariés de droit privé et fixe des règles pour faciliter l’intégration de ces personnes en milieu ordinaire. Toutes ces nouvelles modalités étant applicables depuis le 1er janvier 2023.
Il est désormais prévu la possibilité de prendre le congé annuel de 30 jours ouvrables[3] au cours de l’année de son acquisition et un report est bien prévu en cas d’absence pour maladie, pour accident du travail ou maladie professionnelle, ou retour d’un congé de maternité ou d’adoption. Il est donc instauré un droit au repos plus accessible et flexible.
Les congés exceptionnels pour événements familiaux ont été modifiés en intégrant des nouveaux cas (congés en cas de décès d’un enfant ou d’une personne à charge effective) et en se calant sur le droit des salariés (trois jours de congés en cas de décès des parents).
Les travailleurs peuvent donc bénéficier de :
- quatre jours en cas de mariage mais aussi, désormais, de conclusion d’un pacte civil de solidarité (Pacs) ;
- trois jours pour chaque naissance ou arrivée d’un enfant en vue de son adoption ;
- cinq jours pour le décès d’un enfant (sept jours dans certaines situations, notamment lorsque l’enfant est âgé de moins de 25 ans ou s’il est lui-même parent) ;
- huit jours de congé de deuil, fractionnable et à prendre dans un délai d’un an, en cas de décès d’un enfant ou d’une personne à sa charge effective et permanente de moins de 25 ans ;
- trois jours pour le décès du conjoint, du concubin ou du partenaire de Pacs ;
- trois jours pour le décès du père, de la mère, du beau-père, de la belle-mère, d’un frère ou d’une sœur ;
- un jour pour le mariage d’un enfant (sans changement) ;
- deux jours pour l’annonce de la survenue d’un handicap ou d’une maladie grave chez un enfant.
Les travailleurs en ESAT ont également accès à tous les congés liés à la parentalité qui sont désormais clairement identifiés par un article consacré[4] : autorisations d’absence liées à la grossesse, à l’accouchement et à la procréation médicalement assistée, ainsi qu’aux congés maternité, paternité et d’accueil de l’enfant, parental d’éducation, pour enfant malade, de présence parentale, de solidarité familiale et de proche aidant.
Le travail du dimanche est désormais bordé : la loi exige l’accord du travailleur, le bénéfice d’un repos compensateur en complément du repos hebdomadaire et une rémunération garantie « au moins égale au double de la rémunération garantie normalement pour une durée du travail équivalente ». Cette rémunération doublée est également prévue pour le 1er mai spécifiquement.[5]
Enfin, la loi consacre un droit à la représentation collective et permet la mise en place d’un délégué des travailleurs handicapés, élu tous les trois ans dans chaque ESAT. La loi prévoit que le candidat doit avoir une ancienneté d’au moins six mois. Ce dernier bénéficiera d’une formation prise en charge par l’Ésat ainsi que d’un crédit d’heures de délégation d’au plus cinq heures par mois. Le délégué des travailleurs handicapés sera chargé « de les représenter sur des situations d’ordre individuel » et sera membre de droit du conseil de la vie sociale (CVS) de l’Ésat, avec voix consultative.
Pour les problématiques santé, sécurité et conditions de travail, les travailleurs de l’Esat pourront participer à l’instance mixte composée en nombre égal de représentants des usagers et de représentants de salariés de l’établissement et service, ayant un rôle de consultation et de proposition sur la qualité de vie au travail, l’hygiène et la sécurité, ainsi que l’évaluation et la prévention des risques professionnels. Cette instance devant se réunir au moins une fois par trimestre.
ð Il est regrettable que la loi n’ait pas prévu plusieurs délégués en fonction du nombre de travailleurs, et donc de la taille de l’ESAT. Le fait de se retrouver seul pour formuler des demandes n’est pas non plus très confortable pour ce travailleur confronté à ce nouvel exercice.
Par ailleurs, la grande nouveauté est la création de cadres légaux prédéfinis facilitant l’expérimentation en milieu ordinaire. Concrètement, le travailleur en Esat aura la possibilité de :
Ø Quitter un Ésat pour le milieu ordinaire et continuer de se faire accompagner par un professionnel de l’Ésat, avec la sécurité d’être réintégré en cas de rupture de son contrat de travail (sur maximum trois ans).
Ø Travailler simultanément dans une autre structure (ordinaire ou adaptée) ou en indépendant. L’activité salariée à temps partiel pourra être exercée pour le compte de tout type de structures (entreprise, collectivité territoriale, association, entreprise adaptée personne physique, etc.) et dans le cadre de tout type de contrats de travail (dont l’alternance ou le travail temporaire).
En conclusion, la loi 3DS qui octroie de nouveaux droits aux travailleurs, à titre individuel et collectif, et qui prône la double activité et encourage à la découverte du milieu ordinaire, sécurise les parcours professionnels de ces travailleurs et c’est une bonne chose. Reste à voir si les moyens humains seront suffisants pour gérer ces accompagnements et permettre une réussite de leurs projets.
Alison VILLIERS – Juriste
Région OUEST
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