La stigmatisation des étrangers est un vieux sport de combat médiéval.
Dans le credo du guide du parfait petit xénophobe, ils seront désignés tantôt comme sans papiers, tantôt comme immigrés, et toujours comme fraudeurs, voleurs ou délinquants.
La couleur de peau ou la religion suffisent à eux seuls à justifier tous les raccourcis ou propos simplistes. Ce qui n’est pas « moi » est forcément étranger et quelque peu suspect.
C’est l’armée du crime contre la France.
Nous ne bouderons donc pas notre plaisir à reprendre le chemin du Musée national de l’histoire de l’immigration**. Celui-ci vient de se refaire une beauté. C’est réussi, d’autant que ce lieu chargé d’histoire mérite plus qu’un simple détour. Œuvres d’art et témoignages divers s’entremêlent pour nous rappeler que notre histoire s’est forgée une âme à force de mélanges.
Nous attendrons encore un peu avant de célébrer le transfert des cendres de Missak et Mélinée Manouchian*** au Panthéon. La main-d’œuvre immigrée entre enfin pleinement dans le roman national. Par ses apports positifs, l’immigration constitue sans conteste une composante indissociable de la construction de notre pays.
D’autres lieux, d’autres œuvres et d’autres rendez-vous continuent de nous le rappeler. Ils méritent de s’y attarder quelques instants afin que notre vigilance jamais ne s’estompe.
Un très bel été à toutes et tous, ici, là-bas ou ailleurs.
Olivier CADIC
Directeur juridique
* Titre inspiré du poème de Jacques Prévert que nous reproduisons ci-contre.
** Palais de la Porte Dorée, 293 av. Daumesnil, 75012 Paris.
*** Nous vous invitons à profiter de la pause estivale pour vous plonger dans le roman de Didier DAENINCKX, Missak, éditions Perrin, août 2009.
À la suite de la rupture de son contrat de travail à l’initiative de l’employeur ou bien en cas de rupture conventionnelle, un salarié peut effectuer les démarches auprès de Pôle emploi afin de percevoir l’allocation chômage.
Cette allocation constitue un revenu de remplacement des revenus professionnels en raison de la rupture du contrat de travail, elle n’a donc pas vocation à se cumuler avec un autre revenu.
Or, les indemnités versées par l’employeur à la fin du contrat de travail constituent un revenu complémentaire. Leur versement va donc décaler le bénéfice des allocations chômage.
Dès lors, au moment de la rupture du contrat de travail, notamment en cas de négociation d’une rupture conventionnelle, il est nécessaire d’être conscient que plus les sommes perçues à la fin du contrat de travail seront élevées, plus le délai avant la perception des allocations chômage sera important.
Ainsi, même si les conditions pour bénéficier de cette allocation sont remplies, l’indemnisation ne débutera pas dès la fin du contrat de travail. Trois délais pourront s’appliquer selon la situation du salarié. Ils commenceront à courir dès l’issue du contrat de travail et ce n’est qu’une fois ces délais passés que le salarié percevra son allocation chômage. Il s’agit :
Le délai de carence Pôle emploi au terme duquel le salarié pourra bénéficier de ses allocations chômage correspond à la somme de ces trois délais, sachant que ces derniers sont exprimés en jours calendaires.
Un délai d’attente de 7 jours, est appliqué systéma-tiquement avant le versement de l’allocation.
Toutefois, si ce délai a déjà été appliqué dans les douze derniers mois, Pôle emploi ne l’appliquera pas une seconde fois.
Par exception, les bénéficiaires du contrat de sécurisation professionnelle bénéficieront de l’allocation chômage à compter du lendemain de la rupture de leur contrat de travail.
Les salariés concernés par ce différé sont ceux qui auront perçu une indemnité compensatrice de congés payés en raison du solde de congés acquis et non pris à la date de la fin du contrat.
Deux situations différentes doivent être distinguées pour le calcul de ce délai :
• En cas d’ouverture de droit ou de rechargement
Le différé est égal à la somme de toutes les indemnités compensatrices de congés payés versées à l’occasion de la fin d’un ou plusieurs contrats de travail des 182 derniers jours divisée par le salaire journalier de référence.
• En cas de reprise de droits existants
Le différé est égal au nombre de jours correspondant aux indemnités compensatrices de congés payés versées à l’occasion de la fin d’un ou plusieurs contrats de travail des 182 jours précédant la dernière fin de contrat. Si ce nombre de jours n’est pas connu, la formule de calcul est la même que pour un rechargement ou une ouverture de droits.
Exemple pratique :
Une salariée a négocié une rupture conventionnelle, son contrat a pris fin le 31 mars.
La date de début des différés est donc le 1er avril.
Elle a perçu 530 euros d’indemnités compensatrice de congés payés
Son salaire journalier de référence est de 38 €.
Le calcul de son différé congés payés est donc le suivant : 530 / 38 = 13,9 >
La durée du différé congé payés sera donc de 14 jours.
Le délai différé « indemnités de rupture » s’applique lorsque les indemnités versées à la rupture du contrat sont supérieures au montant de l’indemnité légale. Pour calculer ce différé il convient de diviser la partie des indemnités de rupture qui dépasse les montants fixés par la loi (indemnités supra légales) par 102,4. Ce diviseur évolue chaque année en fonction du plafond annuel du régime d’assurance vieillesse de la sécurité sociale (PASS).
Le salarié qui n’aurait pas perçu d’indemnités supra légales n’est donc pas concerné par ce différé spécifique d’indemnisation.
À quoi correspond l’indemnité « supra-légale » ?
Le Code du travail prévoit que l’indemnité de licenciement ou de rupture conventionnelle ne peut pas être inférieure à :
• 1/4 de mois de salaire par année d’ancienneté
pour les années jusqu’à 10 ans ;
• 1/3 de mois pour les années d’ancienneté au-delà de 10 ans.
Par exemple : si l’indemnité conventionnelle versée est supérieure à l’indemnité de rupture minimum prévue par la loi, alors elle sera concernée par le différé pour sa partie qui dépasse l’indemnité légale. De même en cas de rupture conventionnelle si un salarié négocie un montant supérieur au minimum légal.
Exemple pratique :
Une salariée a négocié une rupture conventionnelle, son contrat a pris fin le 31 mars.
La date de début des différés est donc le 1er avril.
Les indemnités de rupture qu’elle a réussi à négocier sont supérieures de 988 € au minimum légal qu’elle aurait dû percevoir.
Le calcul de son différé congés payés est donc le suivant :
988/102,4 = 9,64 > La durée du différé« indemnités de rupture » sera donc de 10 jours.
Si l’on reprend l’exemple de notre salariée, son délai de carence Pôle emploi au total correspondra à la somme du délai d’attente, du différé congés payés et du différé « indemnités de rupture ».
La salariée devra donc attendre 31 jours entre la rupture de son contrat de travail et le 1er versement de son allocation chômage. Si elle s’est inscrite à Pôle emploi dès le 1er avril, elle sera indemnisée à partir du 2 mai.
Abdou-Paul bousso
Juriste – Paris idf
Le vote du CSE est un incontournable de toutes vos réunions.
En effet, il est peu probable qu’une réunion ait lieu sans vote. Même si la loi ne le prévoit pas,
la décision d’engager le CSE résulte de la collectivité et donc un vote doit être organisé.
Le vote permet de formaliser certains points tels que :
Même si tous les participants aux réunions ont le droit de prendre la parole, cela ne signifie pas qu’ils puissent tous prendre part au vote.
Tout d’abord, les membres titulaires disposent d’un droit de vote. Les membres suppléants ne peuvent participer au vote que s’ils remplacent un titulaire1. Le représentant syndical n’a quant à lui qu’un rôle consultatif2.
L’employeur a également la possibilité de participer au vote mais uniquement dans certaines situations. S’il ne peut participer au vote lorsqu’il consulte les membres du CSE en tant que délégation du personnel3, il dispose de cette prérogative pour :
Il ne vote pas sur les sujets qui relèvent de la consultation des élus tels que :
Lorsqu’il vote, le président n’a pas de voix prépondérante ni de droit de veto4.
Enfin, les collaborateurs de l’employeur n’ont qu’un rôle consultatif5 et ne participent donc pas aux votes en réunion.
Tout d’abord, il faut savoir qu’aucun quorum n’est requis6 pour qu’une décision soit adoptée,
De plus, les votes se font à la majorité des membres présents lors de la réunion7. Ainsi, toutes les abstentions, votes nuls ou blancs constituent des votes « contre ».
La seule exception à cette majorité concerne les désignations : c’est la règle de la majorité des voix exprimées qui s’applique.
En outre, en cas d’égalité, ce n’est pas le président qui tranche et il n’y a pas de second vote. Le vote est considéré comme « défavorable ».
Attention, cela ne vaut pas forcément pour les désignations. Dans ce cas, il est souvent prévu dans le règlement intérieur du CSE, qu’un second tour sera organisé ; et, dans le cas où il y a toujours égalité, le salarié le plus âgé est désigné.
Il n’est pas prévu de vote par procuration. Ainsi, une résolution, une délibération, ou un avis du CSE ne pourra être adopté que si la moitié +1 des membres présents votent dans ce sens.
À savoir que les votes se font principalement à main levée. La loi ne prévoit que deux cas dans lesquels le vote se fait à bulletin secret :
• Licenciement d’un salarié protégé8 ;
• Nomination ou licenciement du médecin du travail interne9.
Attention, votre règlement intérieur peut prévoir d’autres dispositions. Par exemple, si la majorité des élus titulaires le demande, le vote aura lieu à bulletin secret.
Les modalités de vote sont identiques en visioconférence.
Il nous paraît opportun de clairement faire apparaître au procès-verbal le résultat de chacun des votes. Ainsi, nous vous proposons d’indiquer clairement le nombre de votants, le nombre de votes favorables, le nombre de votes défavorables ainsi que le nombre d’abstentions, de votes nuls ou blancs.
Enfin, nous recommandons d’indiquer expressément le sens de la décision finale du CSE à la suite de ce vote.
Lorsque le CSE est consulté sur un projet entrant dans ses attributions (réorganisation, déménagement, licenciements
économiques, conditions de travail …), il est alors plus que nécessaire de ne pas se cantonner à donner un avis favorable/
défavorable mais de prendre le soin de motiver celui-ci.
C’est une façon :
Pour cela la motivation peut s’articuler, selon les projets, autour des thématiques suivantes :
La rédaction de la motivation de l’avis nécessitera de préparer assez tôt les arguments qui seront développés dans celui-ci.
À l’issue de la réunion, les élus du CSE pourront porter immédiatement à la connaissance de l’ensemble des salariés le contenu de cette motivation.
Audrey LIOTÉ
Juriste Aura
1 C. trav. art. L. 2314-37
2 C. trav. art. L 2314-2
3 C. trav. art. L 2315-32, al. 2
4 Cass. crim. 4-10-1977 n° 76-91.922 P : Bull. crim. n° 287
5 C. trav. art. L 2315-23, al. 2
6 Cass. crim. 6-3-1975 n° 74-90.322 P : Bull. crim. n° 74
7 C. trav. art L 2315-32, al. 1er
8 C. trav. art. L 2315-23, al. 2
9 C. trav. art. R 4623-6.
Vous êtes un certain nombre à débuter un deuxième mandat au sein du CSE, et pour quelques-uns ayant opté pour une durée de mandat inférieure à 4 ans, ce mandat sera déjà le dernier. Qui prendra la suite ? Nul ne le sait ni ne s’en inquiète. Nous ne pouvons attendre l’heure fatidique sans réagir.
Le gouvernement a souhaité lors de la création du CSE en 2017 limiter le nombre de mandats des élus.
Il ressort de l’article L.2314-33 du Code du travail que le nombre de mandats successifs est limité à trois. Cette règle ne s’applique pas aux élus dans les entreprises :
• De moins de 50 salariés ;
• Dont l’effectif est compris entre 50 et 300 salariés, si le protocole d’accord préélectoral en stipule autrement.
Ces dispositions s’appliquent également dans les mêmes conditions aux membres des CSE centraux et des CSE d’établissements. L’introduction de cette restriction inédite dans le Code du travail pose question.
Que le gouvernement ait souhaité par cette disposition apporter un peu de sang neuf au sein de cette instance. Pourquoi pas !
Il n’en demeure pas moins que dans les faits cela place les élus dans une situation inextricable.
Là où il était possible d’alterner les mandats entre DP, CE et CHSCT, la fusion des instances interdit de pratiquer ainsi, sauf à briguer un mandat de délégué syndical… mais leur nombre est limité.
Reste alors à bon nombre d’élus de décider de faire l’impasse sur une candidature lors des prochaines élections afin de mettre les compteurs zéro à l’issue d’un « mandat blanc » avant de repartir pour 3 mandats consécutifs.
Il conviendra, faute de combattants en nombre, de partir à la recherche de nouvelles recrues. « Surtout pas sur une liste syndicale… c’est mal vu par la direction » diront les uns. « Moi au CSE. Jamais de la vie… je ne peux pas me permettre d’être bloqué dans mon évolution de carrière » diront les autres. Et c’est lorsque vous aurez enfin réussi à mobiliser quelques bonnes âmes que vous constaterez que les règles relatives à l’équilibre des candidatures entre les hommes et les femmes exposent votre liste à une contestation sérieuse. Que faire ?
Ce qui était déjà complexe par le passé a de notre point de vue été accentué par l’application de cette règle qui, si elle devait être conservée en l’état, sapera les fondements de la démocratie sociale. Après 12 ans de bons et loyaux services, les élus qui auront représenté l’ensemble des salariés pendant 3 mandats consécutifs de 4 ans au sein du CSE ne pourront plus se représenter. Ils sortiront du champ social pour laisser la place à d’autres ou ne seront tout simplement pas remplacés tant le mandat expose. C’est moins brutal que la disparition des dinosaures ou l’effondrement de la faune sauvage, mais il y a quand même de quoi s’inquiéter.
Pour éviter le pire, nous suggérons à l’ensemble des représentants du personnel et délégués syndicaux des entreprises dont l’effectif est compris entre 50 et 300 salariés, d’exiger que le protocole électoral intègre une clause prévoyant que la limitation du nombre de mandats successifs ne s’appliquera pas.
Faute de pouvoir procéder ainsi dans les structures de 300 salariés et plus, il conviendra de solliciter l’intelligence collective pour demander que cette limitation soit rapidement supprimée du Code du travail.
Nous invitons pour cela chacune et chacun d’entre vous à mettre à profit les prochaines semaines pour interpeller un(e) député(e), afin de lui exposer clairement la situation et de lui soumettre l’idée de travailler à une proposition de texte visant à supprimer les alinéas 2 et 3 de l’article L.2314-33 du Code du travail.
Vous pourriez faire la même chose auprès du Ministre du travail, de la première Ministre ou pourquoi pas du Président de la République… on ne sait jamais.
L’adresse des député(e)s est accessible par le lien suivant :
https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/vos-deputes
Olivier CADIC
Directeur juridique
VRAI. Il est possible d’insérer dans les contrats de travail des clauses de non-concurrence. Ces dernières visent à limiter la liberté d’un salarié d’exercer, après la rupture de son contrat, des fonctions équivalentes chez un concurrent ou à son propre compte.
Pour autant, en application du principe fondamental du libre exercice d’une activité professionnelle et de l’article L. 1121-1 du Code du travail selon lequel « nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives des restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché » la clause de non-concurrence doit, à peine de nullité, répondre à quatre conditions cumulatives.
• Être indispensable à la protection des intérêts légitimes de l’entreprise.
Tous les postes ne sont pas concernés. Ainsi, les fonctions exercées par le salarié doivent être telles que son embauche par un concurrent représenterait un risque réel pour l’entreprise. Une telle clause ne serait pas valable pour un salarié dont les fonctions se résumeraient à des tâches subalternes.
• Être limitée à la fois dans le temps et dans l’espace.
Ne pouvant restreindre de manière totale la liberté de travail, une clause de non-concurrence doit comporter une limitation temporelle, une limitation géographique et s’inscrire dans un secteur d’activité précis.
Ainsi, la clause ne peut pas être à durée illimitée. Pour autant la durée peut être relativement longue (plusieurs années) mais là encore il conviendra d’analyser cette durée à l’aune des autres critères.
Par exemple : une clause de 5 ans pour une interdiction portant sur le département de l’employeur et les départements limitrophes a été jugée valable.
À l’inverse, une clause d’une durée de 2 ans sur tout le territoire français, applicable à un ingénieur chimiste, a été déclarée nulle malgré sa limitation dans le temps en ce qu’elle avait pour résultat d’empêcher purement et simplement le salarié de travailler en France.
Concernant la limitation géographique, cette dernière peut être très vaste (par exemple France entière ou Europe) mais attention cette limitation ne doit pas avoir pour effet d’empêcher totalement le salarié d’exercer une activité professionnelle.
• Tenir compte des spécificités de l’emploi du salarié
La clause de non-concurrence doit laisser au salarié la possibilité d’exercer une activité professionnelle.
• Prévoir une contrepartie financière
La clause de non-concurrence doit prévoir une contrepartie financière qui ne doit pas être dérisoire.
Son montant est librement déterminé par les parties et doit être fixé en proportion des contraintes imposées au salarié après la rupture de son contrat de travail. Il convient également de se référer à la convention collective qui peut contenir des dispositions sur cette contrepartie financière.
FAUX. Si un salarié peut refuser l’insertion dans son contrat d’une clause de non-concurrence si ce dernier n’en contenait pas à l’origine il ne sera pas possible pour le salarié de refuser l’activation par son employeur d’une clause de non-concurrence qui serait valide.
VRAI. L’employeur est en droit, au moment de la rupture du contrat de travail du salarié, de renoncer à l’application de la clause de non-concurrence par écrit, le salarié retrouvera ainsi « sa liberté ». Il convient toutefois de vérifier ce que prévoit la clause en elle-même et la convention collective le cas échéant cette dernière pouvant prévoir une procédure ou des délais spécifiques.
FAUX. Les conséquences d’un non-respect de la part du salarié peuvent être importantes. L’ancien salarié qui ne respecte pas l’interdiction découlant de la clause de non-concurrence risque trois types de sanctions :
• La perte de la contrepartie financière ou le cas
échéant son remboursement si cette dernière a été versée.
• Une condamnation à des dommages-intérêts
envers son ancien employeur.
• Une condamnation à cesser son activité concurrente.
Justin Saillard-Treppoz
Juriste – Responsable AURA
L’actualité du droit du travail et de ses évolutions… du bout des doigts.
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